lundi 24 mars 2008

Changement de paradigme

Quoi de mieux pour conserver et ranger ses trésors qu'une boîte? C'est de là, on le sait, que provient l'origine étymologique du mot "bibliothèque". On sait aussi qu'il en est aussi des boîtes comme des poupées russes qui s'enchâssent l'une dans l'autre. Au fond, la Bibliographie nationale française n'est rien d'autre que la mise en boîte de la production éditoriale française. Le souci majeur des gestionnaires du dépôt légal a toujours été de faire entrer la totalité de la production dans la boîte conçue à cet effet au nom du principe de l'exhaustivité.
La boîte est dotée d'une structure propre avec ses cinq parties, soutenue par un cadre de classement et quadrillée par des index. La Bibliographie nationale française est toute entière gouvernée, comme le voit, par des principes d'organisation spatiale.

Mais la Bibliographie nationale française a toujours été travaillée par des tensions internes. Elle a en effet, outre sa fonction de contenant, un rôle d'annonce. Qui dit "annonce" dit rapport entre le moment où un document est produit et le moment où ce même document est annoncé. Tout l'enjeu, on l'aura compris, consiste à raccourcir l'écart entre ces deux moments. Ce qui est fort louable.

Il n'en reste pas moins que le temps qui fait référence est celui du dépôt légal. Chaque document est classé non pas dans le segment chronologique qui correspond à sa publication mais dans celui qui correspond à sa réception et à son traitement par les services du dépôt légal.

Or ce temps est institutionnel, contre-intuitif et donc foncièrement étranger à l'usager.
Un éditeur qui a publié un ouvrage en mars 2006 doit paradoxalement surveiller les parutions de la Bibliographie nationale française postérieures au premier trimestre 2006 pour y trouver la référence.

La temporalité propre à l'édition est elle même rétive au temps du dépôt légal. Prenons par exemple le phénomène des "quick books", c'est-à-dire de ces livres programmés pour sortir au lendemain même de l'événement qu'ils sont censés décrire (événement sportif, élection, etc.). L'annonce de l'ouvrage intervient alors que celui-ci est retiré des rayons depuis longtemps. Ces annonces a posteriori constituent un singulier paradoxe...

Les usagers n'ont pas toujours une juste représentation du fonctionnement temporel de la Bibliographie nationale française. Un tel croyait par exemple que la Bibliographie nationale française des publications en série recensait toutes les publications vivantes à l'instant "t", ce qui est peut-être une idée loin d'être idiote.

Le paradigme spatial est biblio-centrique alors que le paradigme temporel est davantage centré sur l'usager. Il suffit de rappeler la 4ème loi de Ranganathan qui incite à épargner le temps de l'usager. Or l'exhaustivité du dépôt légal n'est pas de nature à rendre ce service.

Notre hypothèse est que le web 2.0 en fournissant des indications sur la réception et le contexte d'usage du document est en mesure de faire économiser du temps à l'usager.

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